Le centenaire de 1983 a ranimé l"intérêt pour l"oeuvre de Jaspers et relancé la discussion le concernant. Il est trop tôt encore pour affirmer qu"il a définitivement quitté le purgatoire où descendent généralement les écrivains défunts, où il arrive même qu"ils plongent dès avant leur mort. On est en droit de l"espérer après les réunions d"hommage tenues à Bâle, à Heidelberg, à Paris et à Montréal. Chose curieuse, elles ont révélé que la survie ou la résurrection de Jaspers tenait plus à sa philosophie politique et aux perspectives mondialistes de sa vieillesse qu"à la philosophie de l"existence. Ce n"est pas seulement le choix préférentiel des thèmes qui gonflait artificiellement l"importance de la Weltphilosophie, on avait l"impression que la possible renaissance de Jaspers se rattachait à son intervention dans les destins actuels. Ce qui semblait être la part caduque de l"oeuvre apparaissait encore riche de promesses. Mais ne serait-ce pas là de nouveau une passagère illusion?