Linguistique de l’écrit

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Revue | Volume | Article

173286

L'espace en linguistique cognitive

problèmes en suspens

Jean-Michel Fortis

pp. 43-88

Résumé

RÉSUMÉ: Dans cet article, nous discutons des problèmes auxquels doivent faire face les théories qui décrivent les conditions d’emploi des morphèmes «spatiaux» (notamment les adpositions) en faisant référence essentiellement aux propriétés des entités situées et aux relations concrètes qui les unissent. Nous soulignons que l’emploi des adpositions repose aussi sur des facteurs «pragmatiques», qui reflètent chez les locuteurs la préoccupation de focaliser sur l’information pertinente dans un contexte donné, et aussi sur la prise en compte de la valeur différentielle des prépositions concurrentes et du type aspectuel du verbe qu’elles complètent. Dans le cas où les adpositions sont définies de manière très spécifique et, dans leurs usages spatiaux, en référence à la spatialité, rendre compte de leur polysémie, par exemple de leur emploi pour signifier des relations temporelles, s’avère problématique. La notion de catégorie radiale (à degrés de typicalité) est souvent appelée à la rescousse. Toutefois, cette notion suscite de nombreuses questions, dont celle de savoir si les catégories ainsi dégagées sont des comptes rendus descriptifs de faits linguistiques ou des hypothèses psychologiques sur la structure des représentations sémantiques. En outre, il est souvent affirmé que l’extension des expressions «spatiales» à des domaines non spatiaux résulte de transferts métaphoriques. Nous montrons que ce processus de métaphorisation pourrait n’être pas aussi systématique qu’on veut souvent le croire, notamment en ce qui concerne les usages temporels des expressions «spatiales». Enfin, nous proposons une typologie sémantique des modes d’expression des relations spatiales. Cette typologie nous sert à illustrer le fait que les relations spatiales peuvent être exprimées par des morphèmes ou des constructions qui n’ont pas de signification «spatiale». Cette dernière observation discrédite à notre avis l’idée de délimiter nettement l’ensemble des expressions spatiales par le fait d’avoir une signification spatiale, et compromet toute tentative d’associer l’expression des relations spatiales au fonctionnement d’un module de traitement cognitif des relations spatiales.

Détails de la publication

Publié dans:

(2004) Langue et espace. Histoire Épistémologie Langage 26 (1).

Pages: 43-88

Citation complète:

Fortis Jean-Michel, 2004, L'espace en linguistique cognitive: problèmes en suspens. Histoire Épistémologie Langage 26 (1), Langue et espace, 43-88.